L’Association fiscalité et développement local (AFDL) a organisé sa deuxième grande conférence publique de l’année, le samedi 30 novembre 2024 à Ouagadougou, sur le thème : « la loi 034-2009 sur le foncier rural : qu'a-t-on gagné ou perdu ? ». Les échanges ont abouti à des recommandations formulées par les participants pour une meilleure gestion du foncier rural au Burkina Faso.
La question foncière, problématique sensible au Burkina Faso, est d’un enjeu crucial pour la stabilité sociale et le développement socioéconomique du pays. C’est pourquoi elle est inscrite parmi les priorités du gouvernement de Transition dans sa politique de refondation de l’Etat. Elle constitue également une préoccupation pour les organisations de la société civile, dont l’Association fiscalité et développement local (AFDL) qui a choisi de consacrer sa deuxième grande conférence publique de l’année à la réflexion sur la législation foncière.
Le 30 novembre 2024, l’AFDL a réuni des experts fiscalistes et domaniaux, acteurs de la société civile et représentants de l’administration publique pour poser le débat autour du thème : « la loi 034-2009 sur le foncier rural : qu'a-t-on gagné ou perdu ? ». L’objectif était de questionner l’application de cette loi, 15 ans après son adoption, en vue de mettre en exergue ses avantages et ses insuffisances et formuler des recommandations à l’endroit des pouvoirs publics pour une meilleure gouvernance du foncier rural.
Développant le thème, le conférencier Ousmane Zoungrana, Coordonnateur de l'Agence nationale du domaine foncier des organismes publics, a posé des questions préalables : quels étaient les objectifs visés par cette loi lors de son adoption ? Quel est le contenu de la loi, et aujourd'hui, quelles leçons peuvent être tirées de son application depuis son adoption en 2009 ?
Dans son analyse, Monsieur Zoungrana a souligné que l'avantage essentiel de la loi 034-2009 aura été de créer ce dispositif d’encadrement de la gestion foncière en milieu rural et surtout d’établir un régime de proximité dans cette gestion. « La gestion foncière était gérée beaucoup plus au niveau local par les acteurs locaux au niveau des collectivités territoriales, mais avec l’accompagnement des directions techniques de l'administration publique », a-t-il relevé.
Servir de pont entre l'administration et les populations
Un autre avantage est que la loi 034-2009 tient compte des us et coutumes. Mais comme toute œuvre humaine, le texte portait quelques insuffisances, constatées à l’épreuve de son application. Ce que le conférencier a appelé « des petits soucis d'inachèvement juridique et institutionnel ».
Ousmane Zoungrana fait référence ici à certains textes réglementaires qui devaient compléter la mise en œuvre de la loi, ainsi qu’aux structures de gestion foncière prévues par la loi qui n’ont malheureusement pas pu être créées dans l’ensemble des communes dans lesquelles la loi devait s'appliquer. Des structures comme les services domaniaux ou les commissions foncières villageoises n’existent toujours pas dans certaines communes du pays, rendant donc difficile l’application de la loi.
Le manque de ressources financières aura été aussi un sérieux handicap pour la mise en œuvre efficace de la loi, a poursuivi le conférencier qui a salué l’initiative de l’AFDL de permettre la réflexion autour d’une question aussi majeure.
« C’est à travers les échanges avec les participants que nous allons tirer des leçons et faire des recommandations à l’endroit de l’autorité pour améliorer la gestion foncière en milieu rural et de façon générale au Burkina Faso », a confié le conférencier.
Et pour son président, Amos Zong-Naba, l’ambition de l’AFDL, est d’apporter sa contribution dans l’information et la sensibilisation des populations et de formuler des propositions aux décideurs. Il s’agit donc pour l’association de servir de pont entre l'administration publique et les populations, afin qu'elles comprennent davantage les questions fondamentales liées à la fiscalité, au foncier, à la comptabilité, aux finances de façon globale. Le choix de mettre en question la loi sur le foncier rural se justifie par le fait que la gestion domaniale est une préoccupation d’ordre général à l’échelle du pays.
Plus de synergie dans les initiatives
« Nous pouvons dire que les autorités font assez en ce qui concerne les questions foncières. Mais nous voulons qu'on se penche encore plus sur le secteur, parce qu'on voit un peu partout des conflits fonciers. Nous voyons qu’il y a des initiatives un peu partout et nous pensons que ces initiatives doivent être imbriquées et être bien expliquées aux populations pour qu'elles en comprennent le bien-fondé », a-t-il soutenu.
Cette deuxième grande conférence publique de l’AFDL a été parrainée par le responsable du groupe Les Génies qui trouve d’un grand intérêt cette initiative de jeter un regard rétrospectif pour faire l’état des lieux de l’application de la loi régissant le foncier rural.
« Notre présence à cette conférence est d'un très grand intérêt en ce sens que les conclusions de cette rencontre vont nous permettre nous aussi à l'interne de voir dans quelles mesures améliorer nos prestations vis-à-vis de nos partenaires et aussi de nos clients », a déclaré le représentant du parrain, Jean-Louis Compaoré.
Le patron de l’activité, en la personne du directeur général de l’Ecole nationale des régies financières, Barthélémy Dabré, s’est aussi montré particulièrement intéressé par le thème de la conférence.
« L'ENAREF est un centre de formation, c'est également un centre de réflexion, car nous avons un département qui s'occupe de la recherche appliquée et cette activité s'insère dans cette démarche pédagogique. Mais ensuite et de façon beaucoup plus marquée et fondamentale, le thème qui est traité fait également partie du curricula que nous dispensons à nos stagiaires ici, notamment les questions liées à la terre, la sécurisation de la terre, l'aménagement du territoire ; c'est donc tout naturellement que l'ENAREF se sent honorée », a-t-il soutenu.
Mouni N’GOLO
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