La Société coopérative avec conseil d’administration/Burkina Mine (SCOOP-CA/BM) a organisé un panel sur les potentialités minières du Burkina Faso et les besoins de financement du secteur le 24 janvier 2025 à Ouagadougou. Placée sur le thème : « Investissement dans le secteur minier au Burkina Faso : opportunités et défis de financement », cette rencontre d’échange entre spécialistes du secteur minier, autorités et potentiels investisseurs a servi de cadre de présentation du modèle de financement participatif développé par la SCOOP-CA/BM.
Pendant longtemps, le secteur minier du Burkina Faso a été dominé par des investisseurs internationaux. La vision actuelle des autorités burkinabè est d’inverser la donne pour placer les nationaux au centre de l’investissement minier. Dans le sillage de cette vision, la Société coopérative avec Conseil d’administration Burkina Mine (SCOOP-CA/BM) veut jouer sa partition.
Lors d'un panel qu’elle a organisé le 24 janvier 2025, à Ouagadougou, plusieurs acteurs clés du secteur ont discuté des enjeux majeurs et des opportunités d'investissement au profit d’investisseurs nationaux, mais aussi des défis auxquels le pays doit faire face pour assurer une exploitation minière durable et inclusive. Au rang des experts et personnalités du monde minier qui ont pris la parole à cette soirée d’échanges et de réflexions, figurent le Chargé de mission du Ministre en charge des Mines, Alexis Dakuyo et la Directrice exécutive de la Chambre des mines du Burkina (CMB), Payidwendé Priscille Zongo, représentant le patronat, le directeur général de la SCOOP-CA/BM, Abdoul-Aziz Kaboré et les experts géologues Samuel Djiguemdé, ancien directeur général du Bureau des Mines et de la Géologie du Burkina (BUMIGEB) et Dr Saga Sawadogo, enseignant d’université qui se sont particulièrement appesantis sur les potentialités minières du pays.
La question du financement a été surtout développée par la directrice exécutive de la CMB. Il est ressorti de sa communication que le cycle de vie d'une mine est composé de trois principales phases, la prospection, la production, et la réhabilitation. Il existe des besoins spécifiques d’investissement pour chaque stade qui (ce n’est pas chaque phase qui peut s’étaler sur une période de 20 ans environ).
« La recherche peut être infructueuse et il alors difficile de trouver une institution bancaire prête à financer ces travaux d’exploration. Dans la pratique, vu les charges énormes de la phase de la recherche, les sociétés minières sont cotées en bourse et lèvent de l’argent sur le marché boursier », a-t-elle indiqué.
Les besoins de financement varient également selon qu’il s’agit d’une mine semi-mécanisée, d’une petite mine ou d’une grande mine industrielle, a-t-elle ajouté.
S’agissant des possibilités envisageables pour les investisseurs burkinabè, Payidwendé Priscille Zongo estime qu'il est essentiel de repenser les modèles de financement existants pour davantage susciter l’adhésion des entrepreneurs burkinabè. Selon elle, des initiatives comme celle de la SCOOP-CA Burkina Mine, qui se veut un modèle de financement coopératif et endogène, peuvent jouer un rôle important dans la mobilisation de ressources internes pour l'exploitation minière.
« Si chacun met 500 000 F, on peut créer une mine »
L’investissement minier nécessite d’importants volumes financiers. Mme Zongo a donc proposé des stratégies permettant de maitriser les coûts, telles que l'utilisation de recherches sommaires en vue d’identifier l’emplacement de gisement et de débuter la production avec une mine semi mécanisée.
« La solution pour nous nationaux est de commencer petit et d’avoir une vision de grandir, en améliorant les équipements au fur et à mesure pour aller plus loin », a-t-elle suggéré.
Une autre stratégie d’investissement des acteurs nationaux dans ce secteur très capitalistique et à risque très élevé est de se mettre ensemble, a-t-elle ajouté, soulignant que certaines multinationales présentes dans l’industrie minière burkinabè sont constituées de millions d’investisseurs internationaux qui ont mis leurs capitaux en commun. « Dans la salle, si chacun met 500 000 F CFA, on peut mettre en place une mine », a déclaré la directrice exécutive de la chambre des mines du Burkina.
En plus de l’exploitation minière proprement dit, le secteur minier présente plusieurs autres possibilités d’investissement, notamment dans la fourniture de biens et services aux entreprises minières, a poursuivi Mme Zongo. En se lançant dans ce sous-secteur, il est judicieux de chercher à entrer dans la base de données fournisseurs des sociétés minières ;mais il faut de la patience et de l’abnégation, car les premiers marchés ne tomberont pas sitôt ! .
« Une entreprise peut passer deux ans et demi pour pouvoir décrocher un contrat. Il est difficile d’entrer dans la base de données mais c’est un marché fidèle si le travail est bien exécuté », a-t-elle confié.
En tout état de cause, la représentante du patronat est d’avis que l’investissement minier a besoin que des mécanismes de garanties soient mis en place pour soutenir les acteurs nationaux. Un sujet qui fait l’objet de réflexion, a-t-elle dit. Mais d’ici là que des solutions émergent, les fonds d’investissement et le financement participatif sont des instruments alternatifs de financement du secteur minier pour les acteurs nationaux, a-t-elle soutenu.
Et le modèle de la SCOOP-CA/BM, tel que présenté par son directeur général, Abdoul-Aziz Kaboré, consiste justement à mobiliser des ressources endogènes pour financer l'exploration et le développement de projets miniers. Cette initiative vise à impliquer les opérateurs économiques nationaux, depuis la phase de recherche, d’exploitation des ressources à celle de la production minière.
Construire 10 mines semi mécanisées dans 5 ans
Abdoul-Aziz Kaboré a exprimé le souhait de voir de plus en plus d'investisseurs nationaux se lancer dans l'exploitation minière. En effet, le Burkina Faso, malgré son contexte sécuritaire difficile, demeure une destination attractive pour les investissements dans le secteur minier. Le pays génère des milliards de francs CFA grâce à la production d’or, ce qui prouve que le secteur reste une source importante de richesse, a déclaré Mr Kaboré.
Créée en 2022 avec un capital de 100 milliards F CFA, cette coopérative qui compte actuellement plus de 3 000 membres, se donne donc pour mission de devenir un acteur clé dans la mise en place des sociétés d’exploitation minières, de faciliter l’investissement dans le secteur minier, d’inspirer et de susciter une génération d’investisseurs et d’entrepreneurs miniers nationaux, de promouvoir l’expertise nationale et le contenu local.
La SCOOP-CA/BM nourrit de grosses ambitions pour le secteur minier burkinabè d’ici 2030. Il s’agit de la mise en place de 10 mines semi mécanisées, l’exploitation d’une grande mine industrielle, la création de plus de 1500 emplois directs et indirects, la production d’environ trois tonnes d’or, une contribution d’au moins 5 milliards de F CFA au budget de l’état, la distribution de 15 milliards F CFA de dividendes aux membres, la construction d’infrastructures socioéconomiques, etc.
Mais pour y arriver, le projet a besoin d’une adhésion des Burkinabè. C’est pourquoi, Abdoul-Aziz Kaboré a appelé ses compatriotes à s’approprier l’initiative portée par la SCOOP-CA/BM, en devenant membres et de plusieurs manières. Les membres diamant souscrivent à 50 actions, les membres or à au moins 20 actions et les membres argent, entre 1 et 19 actions. Pour ces trois catégories de membres, le coût de l’action est de 500 000 F CFA. Dans son approche qui se veut inclusive, la SCOOP-CA/BM a prévu une quatrième catégorie de membres qui peuvent souscrire entre un et quatre actions, avec 100 000 F CFA comme valeur de l’action.
Une initiative que le Chargé de mission au ministère en charge des Mines, Alexis Dakuyo, n’a pas manqué de féliciter. Le représentant de la tutelle a également apprécié la tenue de ce panel sur un thème d’actualité pour son département. En effet, Mr Dakuyo a soutenu que la vision des autorités est de mettre en place des conditions permettant au secteur minier de profiter d’abord aux Burkinabè. Ce qui s’est traduit par des innovations et des réformes pour favoriser l’entrée des acteurs nationaux dans la chaîne de l'exploitation minière.
Reconnaissant à juste titre le problème que pose l’accès au financement, le Chargé de mission a appelé les institutions financières à développer des produits financiers adaptés pour accompagner les acteurs nationaux. « Les multinationales ont l'accompagnement des institutions boursières et financières qui se sont spécialisées dans l'accompagnement du secteur extractif. Nous invitons le secteur financier à envisager des produits dans ce sens et pour accompagner l'exploitation minière », a-t-il insisté.
Mouni N’GOLO
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